Bruno est parti.

C’est une façon douce d’annoncer à ceux qui ne le savent pas encore le décès de notre ami Bruno Léchevin mercredi dernier. De façon totalement inattendue. De façon très brutale.

Hier, dimanche, je suis allé embrasser Marie-Claude, sa femme, Mathieu et Quentin, leurs fils. Au-delà de la tristesse et des larmes des uns et des autres, l’essentiel a été de nous souvenir, ensemble, de tout ce que Bruno avait fait de beau et de grand dans sa vie.

Ses premiers engagements, il les fait à la Jeunesse Ouvrière Catholique dont il deviendra à 22 ans le Président. Il organisera notamment un rassemblement avec plus de 10 000 jeunes venus de toute la France.

Puis il entre à EDF comme magasinier et s’engage à la CFDT. Il prend une part active dans la réflexion en faveur de la semaine de 4 jours. En septembre 1993, avec une poignée d’amis, j’avais lancé le débat sur la semaine de 4 jours. Bruno avait été l’un des premiers à nous contacter pour nous rencontrer et nous faire venir devant d’autres responsables CFDT… En 1995, lors du Congrès de la CFDT à Montpelier, c’est lui qui obtient un vote massif sur un amendement affirmant que « la CFDT demande une Loi-cadre pour aller à 32 heures. »

Quelque temps plus tard, Bruno alors Secrétaire général de la CFDT Énergie organise la fusion avec la CFDT Chimie. Pour favoriser le rapprochement, il explique très clairement qu’il laisse la place de Secrétaire général au Secrétaire général de la fédération Chimie. Toujours la même volonté d’agir pour le bien commun sans se mettre en avant…

Je ne sais plus à quel moment il a créé Electriciens sans frontières. Une ONG qui intervient aux quatre coins du monde quand une catastrophe naturelle a mis à bas le réseau électrique. Adossée initialement aux moyens humains et matériels d’EDF, Electriciens sans frontières a grandi et gagné son « indépendance ». Cette ONG fait aujourd’hui un super travail pour répondre aux situations d’urgence mais aussi pour aider au développement durable dans toutes les zones où elle intervient.

Bruno est ensuite nommé par le gouvernement de Lionel Jospin à la Commission de Régulation de l’Energie. Lui qui était « seulement » menuisier, s’amuse d’être entouré d’énarques et de polytechniciens. Mais très vite, il sera respecté de tous. Son mandat sera renouvelé et, à la fin du second mandat, il sera nommé président de l’Agence de développement et de la maîtrise de l’énergie. Il est très vite apprécié du plus grand nombre et c’est là qu’il commence à s’engager vraiment sur les questions climatiques.

Il y a 18 mois, jeune retraité, il rejoint l’association que nous avons créée avec Jean Jouzel pour défendre l’idée d’un Pacte Finance-Climat. Il met ses réseaux et ses dons de manager au service de ce beau projet. Et il y a 6 mois, quand je suis élu député européen, il devient le Délégué général de l’association. Il était venu à Bruxelles il y a trois semaines, avec Édouard et Lucas, pour préparer l’évènement que nous voulons organiser en avril pour faire connaître nos idées du plus grand nombre de leaders européens. La précarité énergétique et la lutte contre le dérèglement climatique étaient LES causes majeures qui motivaient son engagement.

Tout au long de sa vie, Bruno a été un homme engagé au service des autres, dans les associations, dans le syndicalisme, dans les institutions. Il l’était tout autant familialement, et très souvent, le lundi matin, en réunion d’équipe de l’association, il nous contait le week-end familial avec tendresse.

Merci Bruno. Merci aussi à Marie-Claude sans qui rien de tout cela n’aurait été possible.

Pierre Larrouturou