Aline Prevot et Alice Lemesle, étudiantes et adhérentes à Agir pour le climat, nous proposent une analyse de l’écologie politique. L’urgence climatique, l’effondrement de la biodiversité ainsi que les problèmes sociaux se retrouvent dans le slogan « fin du monde, fin de mois ». Ils nous interrogent sur la place de l’écologie dans l’échiquier politique.

Les partis politiques écologistes se positionnent pour la plupart d’entre eux à gauche de l’hémicycle, souvent même très à gauche. René Dumont, première grande figure de l’écologie politique, représentait une gauche radicale. Explicitement contre le capitalisme agressif et altermondialiste, il est le premier à se présenter à une élection présidentielle sous une étiquette « écologie », en 1974. Le parti politique Les Verts apparaît en 1984, puis fusionne avec les listes d’Europe Écologie pour fonder en 2010, Europe Écologie-Les Verts. Ce mouvement se revendique de gauche bien qu’en tentant de renvoyer une image moins radicalisée. Nous sommes donc habitués à associer aux partis écologistes des politiques sociales de gauche. Nous prendrons la métaphore de la pastèque, ludique mais pertinente pour qualifier cette idée : vert à l’extérieur, rouge à l’intérieur.

Pourtant, d’autres partis écologistes se positionnent davantage au centre. Génération Écologie, qui s’est aussi appelé de 2002 à 2007 Génération Écologie-Les Bleus, avant de revenir à son nom initial, en est un exemple. Cap21, un parti centriste créé en 1996 par Corinne Lepage, se définit comme réformateur tout en défendant une conception républicaine de l’écologie. Après tout, le conservatisme n’est-il pas plus proche de l’écologie, en ce sens qu’il pourrait mettre au centre la préservation de nature dans sa doctrine ?

L’actu : le rapprochement droite et écologistes en Autriche

En ce début de 2020, l’Autriche bouleverse les idées préconçues avec une configuration inédite au gouvernement : le parti de la droite conservatrice s’est pour la première fois allié avec les Verts. Alliance peu conventionnelle, elle a d’autant plus surpris que le parti de droite opère un véritable revirement politique en fermant la porte aux nationalistes pour se tourner vers les écologistes. Depuis le début de l’année, le gouvernement de coalition se partage les fonctions : le poste de chancelier et dix ministères reviennent au parti de droite tandis que les Verts prennent le poste de vice-chancelier et quatre ministères. Pour Carlos Invernizzi Accetti, professeur de science politique : « la diversification croissante des positions écologistes est un signe que le mouvement dans son ensemble arrive à maturité ».

Une écologie politique doit-elle nécessairement s’allier à un camp ?

Une écologie politique peut donc être de droite comme de gauche, voire ni l’un ni l’autre ! C’est ce que disait Antoine Waechter, qui a cette phrase célèbre : « L’écologie n’est pas à marier ». Waechter, qui s’est éloigné des Verts pour fonder son propre parti le Mouvement Écologiste Indépendant (qui n’a jamais réussi à réellement percer), considère l’écologisme comme un projet politique à part entière, distinct de la droite et de la gauche, mais pouvant s’allier aussi bien avec l’une qu’avec l’autre. Alain Lipietz, membre d’Europe Écologie Les Verts, parle de la doctrine du ni-ni : ni de droite, ni de gauche.

Il faut aussi mentionner le terme d’écofascisme, qui désigne un régime autoritaire fasciste dont la doctrine est de protéger l’environnement. L’écofascisme a été mis en avant par Hans Jonas qui parle ainsi de « dictature bienveillante ». Il peut être le fait, à la fois d’un régime totalitaire de droite ou de gauche, car il caractérise uniquement les théories ne respectant « ni la vie humaine, ni les formes démocratiques » (Carlo de Nuzzo et Clémence Pèlegrin, 2019). Cette assertion permet de penser l’écologie comme transcendant les mouvements politiques.

Entre un écologisme de gauche, de droite, d’aucun des deux, ou de tous les deux, toutes les pensées sont possibles. L’impossibilité de définir l’écologie politique et de lui trouver une affiliation politique particulière, nous permet au moins de conclure que l’écologie est nécessairement politique.

Pour aller plus loin :
Carlo Invernizzi Accetti, L’ère de l’environnement politique, Le Grand Continent, 07/01/2020.
https://legrandcontinent.eu/fr/2020/01/07/lere-de-lenvironnement-politique/
Alain Lipietz, Qu’est-ce que l’écologie politique ? La Grande Transformation du XXIe siècle, La Découverte, 123 pages, 1999.
Alain Lipietz,Vert Espérance. L’avenir de l’écologie politique, La Découverte, 156 pages, 1993.
Carlo de Nuzzo et Clémence Pèlegrin, Les origines historiques de l’écofascisme en Europe, Le Grand Continent, 11/07/2019.