L’électricité, qui doit être utilisée pour réussir la transition écologique, est une énergie largement décarbonée en France. Entre son point de production et son point de consommation, elle doit être distribuée sur le territoire. Alors que se développent rapidement photovoltaïque et éolien, voitures électriques et pompes à chaleur, quels enjeux pour le réseau de distribution d’électricité en France ? Nous avons posé 3 questions à Marianne Laigneau, Présidente du Directoire d’Enedis, pour en savoir plus.

Enedis gère le réseau de distribution d’électricité sur 95 % du territoire national. Pour mener à bien la transition écologique, de nombreux usages deviennent de plus en plus électriques (chauffage avec les pompes à chaleur, déplacements avec les voitures électriques et les transports publics, etc.). Par ailleurs, les productions décentralisées vont se multiplier principalement sur les réseaux de distribution. Quels sont les principaux défis, pour Enedis, d’une électrification d’une telle ampleur et du développement des énergies renouvelables (EnR) ?

Pour Enedis, le déploiement des énergies renouvelables et l’électrification des usages se traduisent de façon très concrète par une hausse significative de nos volumes d’activité, notamment en termes de raccordements des clients.

Aujourd’hui, 90 % des producteurs éoliens et photovoltaïques sont connectés aux réseaux de distribution, nous devrions franchir la barre du million de sites raccordés d’ici à la fin de cette année. En parallèle, le développement des nouveaux usages de l’électricité s’accélère avec plus de 440 000 auto-consommateurs, soit une augmentation de 83 % en un an ! Dans le même temps, dans le domaine de la mobilité électrique, le nombre de bornes de recharge ouvertes au public a augmenté d’un tiers. Et d’ici à 2027, nous prévoyons 46 % d’activité en plus, portée essentiellement par la hausse des énergies renouvelables (+38 %) et des raccordements au réseau des installations de recharge des véhicules électriques (+300 %).

Nous sommes ainsi engagés dans ce que j’appelle une deuxième électrification de la France ! Pour répondre à ce défi, nous devons tout à la fois, augmenter nos investissements, développer nos recrutements et renforcer notre filière industrielle. Un défi supplémentaire est de le faire tout en adaptant les réseaux à la dérive climatique afin de continuer à assurer à tous les Français une électricité de qualité.

Nous prévoyons ainsi d’investir 96 Md€ ici à 2040. En parallèle nous renforçons nos recrutements : après les avoir doublé en deux ans, nous maintenons la dynamique avec 10 000 nouvelles embauches prévues d’ici à 2027. Et pour préparer l’avenir, nous avons, depuis la dernière rentrée scolaire, déployé dans les lycées professionnels “les écoles des réseaux pour la transition énergétique” en partenariat avec l’Éducation Nationale et l’ensemble de la filière des réseaux d’électricité. Dès la rentrée prochaine, ce dispositif de formation des jeunes en Bac Pro, qui rencontre un franc succès, sera étendu aux classes de BTS.

Avec l’accélération des EnR et l’électrification des usages, la réduction des consommations énergétiques est l’un des trois piliers de la transition écologique. Comment Enedis accompagne les nécessaires efforts en matière de sobriété ?

Si la part de l’électricité décarbonée dans le panier énergétique Français est amenée à plus que doubler d’ici à 2050, pour réussir à atteindre la neutralité carbone, cela doit se faire dans un contexte  de réduction globale de la consommation d’énergie de 40 %.

Pour ce faire, nous accompagnons l’ensemble des acteurs de la sobriété énergétique en mettant à leur disposition les données de consommation dont ils ont besoin. Nous nous y étions engagés, dès 2020, en lançant notre Projet Industriel et Humain 2020-2025. Cela passe, par exemple, par la possibilité, pour nos clients, de suivre leur consommation grâce aux compteurs communicants, dont plus de 93 % d’entre eux sont équipés. Cela passe également par la mise à disposition d’analyses de données que nous proposons sur notre site Open Data et sur notre Observatoire Français de la Transition Écologique.

Nous accompagnons également les collectivités dans la réduction de leurs consommations – celles liées par exemple à l’éclairage public – ou encore dans les opérations de rénovation énergétique de leurs bâtiments, avec le service PrioRéno lancé il y a deux ans en partenariat avec la Banque des Territoires et GRDF.

La transition écologique nécessite cependant d’avoir une approche holistique et systémique. C’est pourquoi pour aller au-delà et accompagner la planification écologique des territoires, nous avons lancé dans plusieurs régions un travail exploratoire sur l’impact du changement climatique à l’horizon 2050 et au-delà, sur l’habitabilité des territoires, la vie économique et les activités d’Enedis. Les premières conclusions montrent l’intérêt de travailler avec les opérateurs de services essentiels et les collectivités locales pour établir, ensemble, un plan d’adaptation à ces changements climatiques déjà engagés.

Les axes de travail d’Agir pour le climat en 2024 sont le financement des rénovations performantes des logements et l’accompagnement des élus ruraux dans le développement des EnR. Une coopération étroite entre Enedis et notre association est-elle envisageable ?

Première grande entreprise du secteur de l’énergie à devenir Entreprise à mission en juin 2023, Enedis est un acteur industriel qui agit au plus près des territoires. À ce titre, l’entreprise s’appuie sur des associations locales pour promouvoir et soutenir l’économie de proximité et maintenir la solidarité et la cohésion entre territoires.

Dans le cadre de notre partenariat, Agir pour le climat peut nous permettre de prendre encore plus en compte les aspects systémiques liés au changement climatique et à la nécessité d’une transition juste et inclusive ne laissant personne de côté, en particulier dans les territoires ruraux.