Forêt et climat sont étroitement liés : les forêts, en stockant du carbone, sont nos alliées face au changement climatique, mais elles subissent aussi ses effets qui conduisent à des dépérissements prématurés. Pour mieux comprendre l’importance de la forêt dans la lutte contre le changement climatique, il convient de rappeler quelques données : qu’appelle-t-on exactement une forêt ? Quelle est la taille de la forêt en France ? Est-elle en expansion ou en diminution ? Pour répondre à ces questions, nous avons contacté l’Observatoire des forêts françaises, qui est le portail de référence des informations forestières en France.
Article rédigé avec l’Observatoire des forêts françaises.
Qu’appelle-t-on exactement une forêt ? Quels sont les grands types de forêts présents en France ?
Une forêt est un écosystème relativement étendu constitué principalement d’un peuplement d’arbres et d’arbustes. Les forêts poussent spontanément dans les zones où les conditions climatologiques sont favorables : température, précipitations, ensoleillement, qualité du sol… Si ces facteurs environnementaux le permettent, les arbres peuvent croître et s’épanouir.
Mais une forêt ne compte pas que des arbres. En effet, la définition mentionne qu’il s’agit d’un écosystème. Végétaux, mammifères, oiseaux, insectes, champignons, bactéries… En surface comme en sous-sol, les forêts abritent une multitude d’espèces animales, végétales et de micro-organismes. Ces dernières ont besoin les unes des autres, mais aussi de la forêt, pour vivre. En France métropolitaine, on dénombre 73 espèces de mammifères, 120 espèces d’oiseaux, et 30 000 espèces d’insectes, et tout autant d’espèces de champignons. L’interdépendance entre les différents maillons de la chaîne est essentielle pour que la forêt puisse exister.
En comparaison aux autres pays de l’Union européenne, la France se distingue par sa grande diversité d’écosystèmes forestiers. Sur le continent, elle héberge des forêts de climat tempéré, montagnard et méditerranéen, mais aussi des forêts de climat tropical dans les départements et régions d’outre-mer.
La plupart des forêts françaises métropolitaines sont des forêts de plaine. Elles sont composées majoritairement de feuillus (67 % en France métropolitaine). Elles abritent également une biodiversité vaste et précieuse. D’un point de vue économique, les forêts de plaine sont les plus productives de France. De plus, elles sont facilement accessibles au grand public car souvent situées à quelques kilomètres seulement de grandes agglomérations. Elles représentent alors un lieu d’activité récréative important. Autant de raison de les préserver !
Les forêts du littoral se situent entre la côte et l’arrière-pays. De par leur positionnement, elles jouent un rôle écologique, économique et social majeur. En particulier, elles préviennent des risques naturels comme l’érosion. Les dunes non boisées sont fragiles. Pour les protéger, des techniques qui favorisent la végétation et freinent l’ensablement de l’arrière-pays sont mises en œuvre. L’ONF protège plus de 380 km de cordon dunaire répartis dans 7 départements. Ces paysages attractifs sont également un facteur de développement touristique. Les forêts du littoral présentent des caractéristiques différentes, selon qu’elles se trouvent en zone méditerranéenne ou atlantique.
À l’instar des forêts du littoral, les forêts de montagne jouent un double rôle de protection et de production tout en maintenant la qualité des paysages et la biodiversité. Elles sont composées de feuillus (chênes et hêtres) mélangés ou non à des résineux dans les parties les moins élevées ; en altitude, les résineux dominent largement (pins, sapins, mélèzes et épicéas). Elles remplissent un rôle important de prévention des avalanches, des chutes de pierre, des glissements de terrain et de protection des sols. Leurs écosystèmes jouent un rôle central de régulation des eaux superficielles et souterraines, avec un impact d’autant plus significatif sur la qualité des eaux que les zones de montagne abritent les sources des plus grands fleuves d’Europe.
Les forêts tropicales des cinq départements et régions d’outre-mer (Guyane, Guadeloupe, Martinique, Mayotte et La Réunion) sont des réserves à biodiversité exceptionnelles. Elles sont exclusivement composées de feuillus à feuilles persistantes et peuvent être de nature très différente selon leur emplacement : on distingue la forêt dense humide (dite forêt hygrophile), la forêt mésophile, la forêt sèche appelée xérophile et la mangrove englobant les milieux humides littoraux dont la forêt marécageuse.
Quelle est la taille actuelle de la forêt en France ? Quelle est sa répartition par département ?
La métropole compte aujourd’hui 17,3 millions d’hectares de forêt, soit 31 % de la surface totale (inventaire forestier national 2023, IGN).
Ce taux est légèrement inférieur à la moyenne européenne qui est de 38 %. Seulement 5 pays européens ont une couverture forestière supérieure à 50 % : la Finlande (66,2 %), la Suède (63,8 %), la Slovénie (58,5 %), l’Estonie (52 %) et la Lettonie (54 %). Les pays européens dont la couverture forestière est la plus faible sont l’Irlande (11,1 %), les Pays-Bas (8,9 %) et Malte (1,5 %).
La moyenne française masque de fortes disparités. Les départements bénéficiant du plus fort couvert forestier sont la Corse du Sud (73 %), les Alpes-Maritimes (64 %), le Var (64 %), les Alpes-de-Haute-Provence (63 %), les Landes (60 %), la Haute Corse (59 %) et l’Ardèche (58 %). Cinq départements ont un taux de boisement inférieur à 10 % : la Manche (6 %), la Vendée (7 %), la Mayenne (9 %), les Deux-Sèvres (9 %) et le Pas-de-Calais (9 %).
Source : IGN
Avec 138 essences d’arbres, la forêt française métropolitaine compte près de 75 % des essences présentes en Europe. La majorité de la forêt française est composée de chênes (44 % des arbres feuillus). Deux espèces de chênes, les chênes pédonculés et sessiles, représentent à elles seules plus de 24 % de la forêt métropolitaine.
Les forêts des départements et régions d’outre-mer couvrent, quant à elles, 8,24 millions d’hectares, soit environ autant que la moitié de la surface forestière de la métropole. La forêt tropicale guyanaise représente à elle seule 8 millions d’hectares, ce qui représente 96 % de la surface du département. Le taux de boisement atteint 44 % en Guadeloupe (72 000 ha), 47 % en Martinique (524 000 ha), 39 % à La Réunion (98 000 ha environ) et 38 % à Mayotte (14 000 ha).
Ces massifs forestiers se caractérisent surtout par leur très grande diversité biologique, notamment la forêt guyanaise, qui est une forêt amazonienne. Pour cette dernière, on estime le nombre d’espèces végétales à environ 10 000 (dont 1 800 essences d’arbres), les vertébrés à 1 200, les insectes à 400 000 (soit 10 à 20 % des espèces inventoriées dans le monde).
Une idée commune est que le couvert forestier est en diminution en France : il y aurait de moins en moins de forêts. Qu’en est-il ? Comment la forêt évolue-t-elle aujourd’hui ?
La forêt française métropolitaine gagne du terrain. Selon l’inventaire forestier national 2023 de l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN), sa superficie augmente de 85 000 hectares par an en moyenne depuis 1985. De 14,1 millions d’hectares en 1985, la surface forestière métropolitaine s’élève aujourd’hui à 17,3 millions d’hectares. Il s’agit en grande majorité de forêts appartenant à des propriétaires privés.
Cette dynamique est principalement due à la déprise agricole qui survient dans les régions les moins accessibles et les moins fertiles : ces zones agricoles sont peu à peu délaissées, et la forêt reprend ses droits.
Les forêts sont plus nombreuses mais aussi plus denses ; il y a de plus en plus de bois. Cet accroissement du stock en forêt depuis des décennies (+50 % en 30 ans) contribue à atténuer l’effet de serre. En effet, les forêts en croissance piègent du carbone atmosphérique lors du processus de la photosynthèse, ce qui tend à réduire la concentration en CO2 de l’atmosphère.
Cependant l’IGN a observé au cours des dix dernières années un ralentissement de 4 % de la croissance des arbres et une très forte accélération de leur mortalité, de l’ordre de 80 % de plus ces dernières années par rapport à la décennie précédente, même si cela ne représente que 0,5 % du volume total de bois.
En effet, les forêts sont de plus en plus touchées (par les crises climatiques et sanitaires), marquées par des sécheresses répétées, des incendies de plus en plus nombreux et importants, la prolifération de bioagresseurs et de maladies. Les phénomènes les plus visibles sont les incendies, mais, la dégradation de l’état de santé des forêts due au changement climatique, les rendant plus vulnérables aux maladies, a causé autant de dommages que l’ensemble des incendies survenus au cours des 35 dernières années en France, soit 670 000 ha.
Si les forêts sont des alliées dans la lutte contre le réchauffement climatique, elles en sont également les victimes. Dans un contexte en évolution, la forêt a des capacités d’adaptation naturelles. Par exemple, des espèces d’arbre ont déjà progressivement « migré » dans le passé lors d’évolutions climatiques. Les arbres présentent également une très grande diversité génétique.
Cependant, l’intensité et la rapidité du changement climatique actuel rendent incertains les effets de ces mécanismes naturels. Les chercheurs et les forestiers tentent donc de mieux comprendre leur fonctionnement, mais aussi de « prendre de l’avance », par exemple en favorisant, voire en implantant des espèces d’arbres jugées plus adaptées en fonction des projections climatiques. En somme, à aider les forêts à être plus adaptées aux climats futurs.
Qu’est-ce que l’Observatoire des forêts françaises ?
Aujourd’hui les forêts sont indéniablement soumises à des pressions croissantes, dont les effets du changement climatique. L’Observatoire des forêts françaises a pour objectif de devenir le portail de référence des informations forestières, facilement accessible pour tous les acteurs du secteur de la forêt, du bois et de l’environnement.
S’appuyant sur des experts forestiers reconnus, l’Observatoire rassemble, élabore et présente des analyses et des données actualisées et détaillées des grandes thématiques forestières (santé des forêts, risques incendies, ressources en bois, adaptation au changement climatique et atténuation de l’effet de serre, et prochainement biodiversité forestière). L’Observatoire propose ainsi une information approfondie des écosystèmes forestiers et une compréhension des différentes pressions qui s’exercent sur eux. De plus, grâce aux outils mis à disposition, il accompagne la mise en œuvre des politiques nationales et territoriales en faveur de la gestion forestière durable.